christophe
petchanatz
klimperei & around / interviews
" Klimperei ? " par Christophe Petchanatz
Klimperei est un groupe éminemment européen.
La preuve ? L’histoire, la genèse.
D’abord
le nom. « Klimperei » ; en allemand : pianotage. Pourquoi
un nom allemand ? D’abord à cause de ce sentiment
européen, précisément ; une Europe culturelle,
celle qui va de Dævid Allen, Kafka, Gombrowicz, Chopin, Satie,
Schiele, Gogol aux Beatles, Faust, Brian Eno, Gentle Giant, Area (le
groupe italien, pas la compagnie d’autoroutes) en passant par les
Gilles de Binche, Kurt Weill, la viole de gambe, Xenakis, Fellini et
les fêtes foraines de mon enfance. Pas des
références pour faire le malin, juste esquisser le
goût des fondations…
Et
puis, la posture était radicale (mais non argumentée) :
« pas de nom anglais, pas de nom français ». Avouez
que Klimperei — trouvaille ! —, ça sonne comme la
musique…
Dès
ses débuts Klimperei a tissé des liens avec des labels
belges, néerlandais, allemands, italiens… Il n’y
avait guère d’Internet et la poste, avec son train de
sénateur, assurait le lien : courriers en anglais improbable,
allers-retours, compréhensions approximatives… mais
ça marchait, avec de la patience, et beaucoup d’humour.
Les
gênes aussi. Dans ma composition (arrivée le 28 mars 1959,
à Lille) : ¼ de lyonnais (Jeanne, mère de mon
père), ¼ de bosno-serbe (Ostoja, père de mon
père), ¼ de savoyard mâtiné d’italien
(Eugène, père de ma mère), ¼ de flamand
(Berthe, mère de ma mère). Alors forcément.
Et
la musique, dans tout ça ? Les chroniqueurs disent : «
toy-music, naïve, acoustic, experimental, minimal, childish,
neo-classic, bizarre, avant-garde, lunaire... French toy-pop...
boîte à jouets renversée... avan strange toy pop
chamber music... » et ma foi, cela nous convient… French
toy-pop aurait été forgé par des japonais, pour
Klimperei. Ils y associent akorage, en précisant le sens :
« the whole feeling is that : not exactly depressed but the
feeling of something lost : lost childhood, lost loves, the passage of
time, the Autumn, the fall of leaves, the almost forgotten tastes or
flavors… erased dreams… » mais cela nous
éloigne… un peu…
La
parenté avec Pascal Comelade, découvert après la
sortie de « when memories began to fade » me sied :
l’homme est – vu d’ici, d’une
âpreté, d’une intégrité et d’une
culture fort respectable. Et nous avons un Pierre Bastien en commun,
lequel était notre voisin, à l’époque des
sessions de Eggs Air Sister Steel, avant qu’il ne s’en
aille en Hollande… et que nous enregistrions Mécanologies
portative, à distance, par la poste…
Depuis
(depuis 1985), une bonne vingtaine de CDs ont été
publiés, après autant de cassettes, et les japonais
s’en sont entiché (comme de tant d’autres
choses…).
Quoi
d’autre ? de l’écriture aussi. Les curieux taperont
« petchanatz » dans Google, et suivront les fils…
Klimperei
était deux, Françoise Lefebvre et Christophe Petchanatz.
Ils se sont séparés en 2002. Françoise est le Syd
Barrett de Klimperei. On peut la lire ici : homme-moderne.org
La
musique continue. Évolue, bricole, revient en arrière,
s’interroge, oublie. Le piano, le vrai piano, n’est plus
là. Charango, banjo, guitare préparée l’ont
remplacé.
Christophe Petchanatz pour Room Service Europe