Klimperei : La musique, un jeu
d'enfant?
Par
quel miracle, les CD aux pochettes aisément reconnaissables
de
Klimperei se retrouvent-ils chez les disquaires du Japon, sans
même que cette "entité à
géométrie
variable" basée à Lyon se produise en concert?
Son pivot,
le compositeur et musicien Christophe Petchanatz en est le premier
étonné.
Franc-Parler : Pourriez-vous
situer Klimperei en quelques mots?
Christophe
Petchanatz : Je travaille actuellement avec deux musiciens, un
guitariste et un bassiste. On travaille également beaucoup
par
courrier ou par mèl. Il semblerait qu'on ait davantage
d'auditoire hors hexagone disons qu'intra-muros. On travaille
essentiellement avec la France, le Japon et les États-Unis.
FP : À quoi cela
est-il dû?
CP
: Je n'en ai aucune idée. Vraiment, je ne sais pas. Je crois
qu'il y a eu des hasards, des circonstances qui ont fait que certains
labels étrangers se sont intéressés
à ce
qu'on faisait et ils ont fait un bon travail de distribution et de
promotion. Je pense notamment à Novell Cell Poem pour le
Japon
mais je crois qu'il y a beaucoup de hasard dans ces
choses-là.
Et puis c'est vrai que je ne fais pas de " management ", je ne m'occupe
pas de la promotion donc ça se fait comme ça se
fait,
plutôt par rencontres, par affinités, par
réseaux.
FP : Klimperei est un groupe qui
utilise beaucoup d'instruments enfantins.
CP
: Oui, on utilise pas mal de jouets effectivement :
mélodica,
métallophone, xylophone, petits sifflets, flûtes
en
plastique, petites percussions. Et aussi n'importe quoi qui sonne bien
: morceaux de bois, de métal...
FP : Comment est venue cette
idée?
CP
: C'est aussi un concours de circonstances : avant de faire ce
groupe-là, je jouais dans un autre groupe qui faisait de
l'électro-pop (Los Paranos) et puis je me suis un peu
lassé. J'avais fait le tour de ce que je pouvais faire avec
ce
type d'instrumentation et Françoise, ma femme à
l'époque, avait envie de reprendre le piano et ça
m'intéressait aussi. On a vendu tout notre
matériel pour
acheter un piano. Et on est repartis avec simplement avec un piano
à quatre mains en composition. Et puis j'avais à
l'époque un voisin qui avait une collection de jouets
musicaux,
comme ça pour s'amuser, qu'il nous a
prêtés et
qu'on a commencé à intégrer aux
compositions.
Ça s'est fait comme ça.
FP
: Quand on parle de musique avec des instruments pour enfants,
aupremier abord on peut imaginer de la musique destinée
à
des enfants. Est-ce le cas?
CP
: Non. Je
crois que ça peut s'adresser à tout le monde. Je
dirais
que la dimension enfantine est dans l'oreille de celui qui entend et je
crois qu'on peut être enfant à tout âge.
Il me
semble que s'il y a des résonances enfantines ça
ne veut
pas dire nécessairement que ça s'adresse
à des
enfants. Ceci étant, il semblerait que les enfants aiment
bien
notre cette musique.
FP : Jusqu'à
présent, vous ne vous produisez pas sur scène.
Comment peut-on vous écouter?
CP
: C'est du travail de studio, c'est le support disque, les disques sont
disponibles ici ou là chez des distributeurs, en magasin
pour
certains d'entre eux. Je pense que les gens qui un jour ou l'autre
tombent là-dessus et sont intéressés
doivent faire
un petit effort de recherche en utilisant l'Internet notamment qui est
le meilleur biais pour tâcher de se les procurer s'ils le
souhaitent et si c'est toujours disponible.
FP
: Vos CD Pimpant, Triste, Sérieux ont
été
publiés au Japon. D'où viennent tous ces titres?
CP
: C'est une trilogie. Ces disques sont sortis quasiment en
même
temps. Il s'agit presque essentiellement de titres qui avaient
été publiés originellement sur
cassettes. C'est un
peu la reprise de l'historique de ce qu'on avait publié
sachant
que les tirages sur cassettes étaient à peu
d'exemplaires, mal distribués et d'une qualité
sonore qui
n'était pas excellente. C'était une
idée qui
m'intéressait beaucoup, de rendre ce fonds-là
disponible
de nouveau et avec une qualité sonore décente.
FP : Triste, ou
sérieux, est-ce l'état d'esprit du musicien que
vous êtes?
CP
: Non, les morceaux ont été répartis
par genre,
c'est un peu arbitraire et certains morceaux de Sérieux
auraient
pu être classés dans Triste. Sur le moment,
c'était
une répartition qui s'est faite comme ça.
L'état
d'esprit ou la musique de Klimperei n'est pas triste. Elle est
plutôt nostalgique. Je pense qu'on est toujours
enracinés
là-dedans. Il me semble que c'est l'enfance qui
détermine
assez fortement la trajectoire qu'on va avoir après ou qu'on
essaiera d'avoir consciemment ou pas. Je fonctionne assez comme
ça. C'est quelque chose qui est là. C'est le
terreau,
c'est le soubassement de ce qui nous constitue.
FP : Quelles sont vos influences,
qu'est-ce qui vous a guidé?
CP
: Je pense qu'il y a deux volets importants. Il y a la musique
classique d'une part, dont la musique française notamment
Satie,
Ravel, Debussy, pour aller vite, toute l'école
française
de cette période-là et puis des musiciens
français
des années 70 qui donnaient parfois dans la musique minimale
ou
qui faisaient de petites pièces aussi. Je pense notamment
à Albert Marcoeur, ZNR, Tazartès,
Étron fou.
C'étaient un peu les musiques novatrices des
années 70,
tendance française.
FP : Vous vous
considérez comme un précurseur, un novateur?
CP
: Pas du tout. Chacun apporte sa petite pièce à
un
élément d'ensemble. Je pense que ce n'est pas
l'idée d'être novateur qui est importante parce
que dans
ce cas-là on serait sans cesse en train d'essayer de casser
les
structures qu'on vient de construire mais c'est plutôt
cultiver
son univers personnel.
FP : Alors, quels sont vos
projets?
CP
: Il y a un projet de collaboration avec une musicienne de Hong-Kong
(Pancakes). Ce sont des chansons qu'elle a composées. Elle
nous
a envoyé des brouillons, que l'on va
ré-enregistrer et
sur lesquels elle ajoutera sa voix. C'est un disque qui devrait
être publié chez In-Poly-Sons, un label
français. Il y a un autre projet important me semble-t-il,
c'est
la participation à une collection spécifique
destinée à l'illustration sonore avec une
coloration bien
particulière, c'est-à-dire de la musique
française
actuelle. C'est un projet à grande échelle avec
une
distribution mondiale. Et puis parmi les projets que j'ai devant moi,
c'est précisément un disque pour enfants.
C'est-à-dire de reprendre les standards des chansons
enfantines
pour les passer à la moulinette Klimperei.
Interview
téléphonique Japon/France, Éric Priou
2003 ;
légèrement réécrit juillet
2005.